L’Histoire de l’art racontée en Belgique a longtemps façonné un monde de l’art sans femme ou presque. Dans les livres, dans les études ou lors des cours académiques – bien que depuis quelques années, des séminaires voient le jour – on aborde peu les femmes artistes ; citées tout au plus, au contraire des hommes surreprésentés.

Immanquablement se pose la question de l’origine d’un tel déséquilibre. Manqueraient-elles de talent en comparaison au génie créateur inné de leurs homologues masculins? Il semble toutefois plus raisonnable et raisonné de replacer la situation des femmes artistes dans un contexte global, à vrai dire social, de la différence de traitement des sexes. La sous-représentation féminine dans les arts résulte d’une sélection favorable aux hommes à plusieurs niveaux : d’abord dans l’éducation et l’accès à l’enseignement, ensuite dans l’accès à la profession, et enfin dans la visibilité donnée par les critiques, les galeristes, les musées et les historiens et historiennes de l’art. La minorisation des femmes artistes procède d’une sélection consciente ou non de la part de ceux et celles qui ont fait et font l’Histoire de l’art. La domination masculine, telle que Bourdieu l’entend étend ses effets à l’ensemble de notre société. Le statut d’artiste, éminemment public, a longtemps été réservé aux hommes, maîtres de la sphère extérieure. De même, ceux qui les font connaître, les galeristes, les marchands et critiques d’art autant que les historiens de l’art, appartiennent en majorité à la gent masculine.

Néanmoins, depuis les années 1970, l’intérêt porté aux femmes artistes tend à s’accroître. Dans de nombreux pays, et aussi en Belgique, s’organisent des expositions, des colloques et des débats sur le sujet. C’est d’ailleurs le cas en ce moment à Tate Modern, de Londres, avec l’exposition « NOW YOU SEE US – Women artists in Britain1520-1920 » (jusqu’au 13 octobre 2024).

En octobre 2024 s’ouvriront deux autres expositions sur les artistes femmes en Belgique ; Untold Stories. Designer femmes en Belgique 1880-1980 au Design museum de Bruxelles et Marguerite Radoux, ma vie est ma peinture,  à la Galerie des Beaux-Arts de Liège. D’autres projets suivront à Gand.

Cette exposition ainsi que l’ouvrage qui l’accompagne, visent au travers d’une sélection d’œuvres, de textes explicatifs, d’un travail de médiation, mais aussi d’articles scientifiques, à éclairer les conditions de production (et de non-production) artistique des femmes en Belgique au XXe siècle, de l’enseignement à la carrière, et par là, tente de contribuer à un rééquilibrage toujours nécessaire.

Ainsi, celle-ci ne donne pas seulement à voir des œuvres d’artistes femmes. Elle remet en contexte, à travers des recherches poussées, les conditions de création de ces artistes, au XXe siècle, en Belgique. Elle développe également les stratégies adoptées par ces artistes afin d’exister dans le champ de l’art d’alors.

Si le cœur vous en dit. Artistes femmes au XXe siècle en Belgique est la première exposition qui aborde ces axes géographique et chronologique.

Assortie d’un catalogue, elle se veut être un véritable outil pour la recherche, et un jalon dans le récit des artistes femmes en Belgique, dont nous espérons qu’elle nourrira à son tour de nombreux projets.

L’exposition se tient du 21 septembre 2024 au 16 février 2025
Du mardi au vendredi de 9h à 17h
Samedi, dimanche et jours fériés de 10h à 18h